Lettre du vendredi #9 : Barcelone et le syndrome de Peter Pan
A return to Barcelona, a taste of freedom, and a few lessons from Neverland
Looking for a fun way to learn French through culture, not textbooks?
This week’s letter takes you on a journey through language, memories, and music. From late-night bar hopping in Barcelona to the films that defined a generation of young Europeans abroad.
You’ll also learn a French expression inspired by injured birds, and discover the best Manu Chao songs in French to add to your playlist.
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English translation available at the end of the post.
Ah Barcelone… Je n’y étais pas revenu depuis longtemps, et pourtant tout est revenu d’un coup : la chaleur sur les joues, les rues vivantes, l’odeur des trottoirs mouillés à 3 heures du matin. J’avais découvert la ville il y a une vingtaine d’année avec quelques amis, en touristes naïfs et émerveillés. Mais c’est en 2012 que j’y ai vraiment plongé, sans plan, sans filet, sans GPS.
Je sortais d’un stage en ONG à Madagascar, intense, douloureux, quatre mois de réalité. De retour dans le Nord de la France, il pleuvait dans ma tête comme dehors. Mon couple battait de l’aile, elle voulait partir au Sud, loin de la grisaille. Une Argentine, courageuse, qui avait tenu deux ans dans les brumes du Nord. Moi, je n’avais pas de boulot, pas de réponse à mes CV, plus beaucoup d’argent. Mais l’appel de la route, lui, sonnait clair.
Alors j’ai pris l’avion et j’ai atterri là, à Barcelone, un sac sur le dos, la guitare dans la main, pas un rond en poche et pas de plan B.
Et pourtant, la ville m’a tendu la main. En deux semaines, j’avais un toit, un boulot. J’étais dans l’Auberge Espagnole.
Je bossais le jour, je jouais parfois de la musique la nuit. Guitare à la main, j’ai chanté dans des bars, dans des salles, parfois pour trois bières, parfois pour rien.
Et quelle vie d’artiste ! Des longues soirées à errer de bar en bar, de squats en after, d’after en after encore, jusqu’au matin qui pique les yeux.
Je me rappelle ce concert improvisé de Manu Chao, un soir, dans un bar de Poble Nou. Il est arrivé comme une ombre joyeuse, a chanté quelques chansons, est reparti. Et c’est ça, Barcelone. La magie sans préavis.
Trois ans ont passé. Mon couple était fini, dissous comme un cachet dans un verre d’eau. J’étais devenu superviseur, avec des responsabilités, une équipe, une routine. Et un jour, on m’a proposé un poste plus sérieux, plus en accord avec mes études : AML Officer, à Madrid. J’ai accepté. Je ne sais pas si c’était par fatigue, par orgueil, ou juste pour changer.
Et puis, j’ai regardé Barcelone une dernière fois et je suis parti.
Je me suis souvent demandé par la suite : et si j’étais resté ?
Mais la vérité, c’est que je devais partir.
Parce qu’à Barcelone, j’étais tombé dans ce qu’on appelle le syndrome de Peter Pan.
Tu sais, ce moment où tu refuses de grandir, où tu vis comme si tout était éternel : les amours, les fêtes, les illusions. Tu ne construis rien, tu flottes. Tu danses. Tu tombes amoureux tous les mois. Tu ne fais pas de projets. Tu vis de lumière, de bière, de chansons et de chaleur humaine.
C’est beau.
Mais ça ne dure pas.
Comme dans le film Hook, que je regardais petit. Robin Williams jouait Peter devenu adulte, qui avait oublié son enfance. Il devait retourner à Neverland pour se souvenir, pour redevenir lui-même. Moi, c’était l’inverse : je vivais à Neverland, et il fallait que j’en sorte. Parce que sinon, j’allais m’y perdre pour de bon.
Alors je suis parti.
Et aujourd’hui, je ne regrette pas.
Mais parfois, tu me connais, j’y repense.
Je me dis que j’y retournerais bien un jour.
Pas pour y refaire ma vie. Pas pour tout recommencer.
Mais pour y goûter une dernière fois, un petit morceau de cette folie douce, de cette vie sans montre ni agenda. Y travailler un peu. Y jouer peut-être. Voir si la ville m’aime encore, si moi aussi.
Juste un dernier passage à Neverland, en adulte éveillé.
Et ça, ça me va très bien.
Timo
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